28.08 — 29.11.2020

Jacques Hérold

L’artiste Jacques Hérold (1910–1987, RO) naquit dans une famille juive en Roumanie. Il commença des études à l’Académie des arts de Budapest, qu’il abandonna en 1929 pour travailler dans un cabinet d’architecture. En 1930, il s’installa en France grâce à de faux papiers d’identité et changea son nom d’origine Blumer en Hérold. À Paris, il fut présenté au groupe d’André Breton, où il entretint également une étroite amitié avec Constantin Brancusi. En 1940, il s’échappa pour Marseille en compagnie d’autres intellectuels, dans l’espoir d’obtenir un visa pour les États-Unis. Il ne quitta cependant pas la France et se cacha dans le quartier arabe de la Porte d’Aix jusqu’en 1942, où il vécut de la confection de bouchées Croque-Fruits. Il quitta le groupe surréaliste en 1951, puis se tourna vers l’abstraction lyrique et le tachisme.

Jeu de Marseille

Parmi les nombreuses réalisations des artistes et écrivain·e·s rassemblé·e·s à la Villa Air-Bel, la plus marquante est certainement le Jeu de Marseille – clin d’œil aux fameux « tarots de Marseille », qu’André Breton étudiait à l’époque. Les Surréalistes réinventèrent l’iconographie d’un jeu de carte classique, reprenant les figures et des symboles fétiches du mouvement. Les couleurs deviennent la flamme de l’Amour (représentée par Baudelaire, la Religieuse portugaise de Stendhal et Novalis), l’étoile noire du Rêve (Lautréamont, Alice de Lewis Carroll et Sigmund Freud), la roue sanglante de la Révolution (le Marquis de Sade, Lamiel et Pancho Villa) et la serrure de la Connaissance (Hegel, Hélène Smith et Paracelse). Les rois deviennent génies, les dames se muent en sirènes et les valets en mages.

Un tirage au sort détermine la conception des différentes cartes : Victor Brauner (Hegel et Hélène Smith), André Breton (Paracelse et l’As de Connaissance), Jacques Hérold (Lamiel et Sade), André Masson (La Religieuse portugaise et Novalis), Max Ernst (Pancho Villa et l’As d’Amour), Jacqueline Lamba (As de Révolution et Baudelaire), Wifredo Lam (Alice et Lautréamont) et Oscar Dominguez (Freud et l’As de Rêve). Au joker est assignée la figure du Père Ubu telle que l’avait dessinée Alfred Jarry. Frédéric Delanglade conçoit quant à lui le dos des cartes et est ensuite chargé de standardiser les cartes en les redessinant d’un trait continu. Elles sont publiées pour la première fois en 1943 dans le troisième numéro de Revue WW, puis éditée en 1983 par André Dimanche.

 

Jacques HéroldJacques Hérold, 'Lamiel. Sirène de révolution - Roue', Jeu de Marseille, Collection Musée Cantini, Marseille